L'ère atomique succède à l'ère chrétienne

"La guerre est terminée mais les ennemis sont encore là. En politique, il y a les corrompus du pouvoir. Ce sont des tricheurs, des menteurs. Avec les militaires à leur solde."

"Ménager les faux prestiges, c'est la tentation habituelle et traditionnelles des politiques parce que les politiques méprisent les hommes."

"L'honneur de la France bafouée, les militaires reviennent, échangent des saluts, claquent des talons, puis filent en bombant le torse comme des gens sérieux qu'on a dérangé dans leurs travaux."

"Plus jamais la guerre !" s'écriait-on à l'ONU. Mais la presse commence à parler de l'ère atomique car les essais nucléaires continuent après Hiroshima et Nagasaki. Suite à l'explosion de la bombe atomique sur l'archipel de Bikini, dans le Pacifique, Bernanos écrit le 31 Juillet 1947 dans Combat :

« La prétendue civilisation de Bikini n'est pas un des aspects d'une nouvelle civilisation dont la civilisation antique et la civilisation chrétienne seraient les deux phases précédentes. La civilisation de Bikini est une contre-civilisation. Ou l'arrêter dans son évolution foudroyante, ou périr. Et d'abord soulever contre elle, mettre contre elle en état d'insurrection, toutes les forces de l'esprit. »

« Je n'ai jamais beaucoup parlé jusqu'ici de la bombe atomique, on ne saurait d'ailleurs aborder un tel sujet sans vomir. Il faudrait même pouvoir vomir et rire en même temps au dégoûtant spectacle donné depuis trois mois par toutes ces nations qui, le regard flambant de convoitise, la langue hors de la bouche, mais la chemise collée aux reins par l'angoisse, louchent ensemble vers l'unique et inquiétante rondeur pointant au corsage de leur grande soeur américaine.
« N'y touchez pas, dit-elle. C'est vrai que j'ai là ce qu'il faut pour faire régner la paix, l'abondance et la justice sur la terre des démocraties, mais ne refusez pas à mon cœur le doux privilège d'assumer seule la tâche de vous rendre heureux. Patientez encore un peu, n'inquiétez pas ma pudeur. Lorsque le moment sera venu, j'entrouvrirai mon corsage, et je donnerai ce sein cancéreux au monde. »

Mais qui - sinon une dictature - contrôle ce moyen d'extermination ? Une dictature qui aboutira tôt ou tard à l'institution d'une tyranie universelle, comme le pressentait Einstein, un des plus grand esprits de ce temps-là. On est vraiment entrés dans une nouvelle ère ! Une inquiétante super-puissance émerge outre-Atlantique avec de nouvelles armes : l'arme nucléaire et l'arme monétaire, le dollar.

Bernanos invitait les jeunes français à changer d'air. Mais les jeunes les plus vaillants étaient morts à la guerre ou pendant la Résistance, ou revenaient des camps de prisonniers après la Libération.
« Vous avez laissé s'organiser un monde où l'homme ne peut plus vivre qu'en troupeau.»

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